L’Intelligence Artificielle, mais c’est quoi exactement ?

Nous allons tenter dans ce billet de définir ce qu’est exactement l’intelligence artificielle… mais personne n’est vraiment d’accord sur celle-ci…
Comme vous pourrez le découvrir, chaque institution y va de sa propre définition et vous pourrez donc y ajouter la vôtre.

Déjà, soyons clairs: il n’existe pas de définition communément admise de ce qu’est l’intelligence artificielle.
Donc si quelqu’un vous vend une solution d’Intelligence Artificielle qui va révolutionner votre business, vous pourrez déjà le déstabiliser en lui demandant sur laquelle de ces définitions il s’est appuyé pour concevoir son produit !

Nous allons donc passer maintenant en revue quelques unes de ces définitions et quelques unes de leurs implications… Accrochez-vous.

Une non-définition comme définition

La première définition, ou plutôt non-définition, est donnée par John McCarthy, à l’origine du tout premier séminaire sur ce qui allait devenir l’intelligence artificielle, en 1956, à Dartmouth (USA).

The problem is that we cannot yet characterize in general what kinds of computational procedures we want to call intelligent. We understand some of the mechanisms of intelligence and not others.

John McCarthy. 2007

En gros: on sait que cela implique des ordinateurs, des calculs très compliqués, mais surtout on sait qu’on ne sait pas vraiment grand chose du sujet. Ca aide un peu, mais pas trop…

La définition purement technologique

Peut-être par appétence personnelle, ce regard me semble bien trop étroit au regard des multiples questions qui se posent autour de l’intelligence artificielle. C’est le choix qu’a fait la CNIL et que je trouverais encore plus étroit que la non-définition proposée par John McCarthy.

L’intelligence artificielle est un procédé logique et automatisé reposant généralement sur un algorithme et en mesure de réaliser des tâches bien définies.

Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés

Très clairement, la logique, l’automatisme, l’algorithme, la réalisation de tâches bien définies correspondent en tous points à la définition des outils. Mais uniquement des outils. Or en IA, l’outil n’est rien sans la donnée.

Sans données, ce fameux algorithme n’est qu’un corps mort, une valise sans poignée, en quelque sorte. Qui plus est, cette valise sans poignée a besoin d’infrastructures. Et qu’est-ce qu’une « tâche bien définie ».

On perçoit donc aisément que la vision de la CNIL apparaît rapidement trop étroite.

L’approche indirecte

Le Conseil de l’Europe a une approche intéressante: il admet d’emblée qu’il n’y a pas de définition communément admise, donc il tente d’en dessiner les contours, en laissant chacun libre de choisir ce qu’il y met.

Le terme désigne en effet indistinctement des systèmes qui sont du domaine de la pure science-fiction (les IA dites « fortes », dotées d’une forme conscience d’elles-mêmes) et des systèmes déjà opérationnels en capacité d’exécuter des tâches très complexes (reconnaissance de visage ou de voix, conduite de véhicule – ces systèmes sont qualifiés d’IA « faibles » ou « modérées »).

Conseil de l’Europe

Cette approche est plutôt intéressante, puisqu’elle fait mentionne la science-fiction, qui fait appel à notre imaginaire, nos espoirs et nos peurs. De manière indirecte, le Conseil de l’Europe pose donc la question de la relation entre l’être humain, la société d’une part et l’IA d’autre part.

Finalement, on quitte déjà la sphère technique pour aller vers l’interaction entre l’être humain et les Intelligences Artificielles (le pluriel n’est pas innocent).

La tentative holistique

La Commission Européenne s’est également emparée du sujet d’autant qu’elle travaille sur un « AI Act » dans le but d’harmoniser les réglementations nationales. Son approche est intéressante: s’éloigner volontairement des technologies, notamment en raison de la rapidité de leur évolution (j’avoue cela donne le tournis).

Software that is developed with [specific] techniques and approaches and can, for a given set of human-defined objectives, generate outputs such as content, predictions, recommendations, or decisions influencing the environments they interact with.

Commission Européenne. Juin 2023

Tout l’intérêt de cette définition est la conciliation des technologies (les logiciels et techniques) avec leur environnement. Les intelligences artificielles doivent donc être appréhendées certes comme des outils mis à disposition d’un utilisateur, mais également dans leur environnement.

Mais qu’est-ce que l’environnement d’un outil d’IA ?

Pour reprendre un mode de réflexion cher aux militaires, l’environnement est ce qu’il y a en amont, en aval et autour.

En amont, nous allons trouver, entre autres, ceux et celles qui ont conçu l’outil, les chercheurs et chercheuses, et son infrastructure informatique. L’organisation qui a commandité cet outil à des fins spécifiques se situe également à ce niveau. La donnée, élément central de l’IA, avec toutes ses problématiques propres, se trouve également en amont.

En aval, nous trouverons les utilisateurs, qui sont à l’interface avec l’outil, qu’il s’agisse des employés de cette organisation ou des consommateurs. En gros ceux et celles qui sont confrontés aux résultats que cet outil leur soumet.

Sur les côtés, nous trouverons les problèmes juridiques, comme la protection des données, la propriété intellectuelle, les compétiteurs (sont-ils déjà passés à l’IA ou non ?), évidemment, la protection de l’environnement, car l’IA peut être très consommatrice de ressources énergétiques, mais aussi de matière première.
J’y ajouterai la société, la culture dans lesquelles ce modèle d’IA est déployé.

Et j’en oublie certainement beaucoup. Mais l’idée reste la même: au-dessus, en-dessous, sur les côtés.

Pour terminer

Est-ce que vous en savez plus sur le sujet ? J’ignore.
Mais si cet article a déclenché une réflexion, c’est déjà énorme !

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Auteur : Fabrice Jaouën

Blog personnel portant sur les sujets d'intelligence artificielle et de société.

2 réflexions sur « L’Intelligence Artificielle, mais c’est quoi exactement ? »

  1. Merci Fabrice d’avoir dressé ce panorama !
    J’aime beaucoup la seconde définition plus complète à mon sens que celle d’un tout technologique.
    J’aime assez la focalisation sur les cas d’usage : quelle nouvelle valeur puis-je proposer à mes clients ? Comment cela va-t-il transformer mon organisation ?

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    1. D’après ce que j’ai pu lire ou entendre, lea définition du cas d’usage est effectivement essentielle, même si sa définition exacte est susceptible d’évoluer en fonction de multiples paramètres que je ne détaillerai pas ici. La création de valeur est trop souvent négligée et l’IA érigée en totem, or, intrinsèquement, elle ne crée pas de valeur.
      La transformation de l’organisation est un sujet critique: tout dépend de la profondeur de l’intégration de l’IA et des données dans son modèle de fonctionnement. Cela peut même devenir un point d’achoppement si une fonction opérationnelle est profondément affectée par l’IA.

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