Guerre cognitive : et si notre conception de la guerre était obsolète?

Notre conception traditionnelle de la guerre est-elle devenue obsolète ? Le concept de guerre cognitive nous permet en fait de dépasser la conception traditionnelle de l’affrontement pour entrer dans une nouvelle dimension.

Image décrivant la guerre cognitive entre un robot et un être humain

Depuis que j’ai été encouragé à m’intéresser aux sujets de guerre cognitive et notamment au rôle joué par l’intelligence artificielle dans cette forme de conflit, je suis confronté à une question récurrente : s’agit-il véritablement d’une guerre ou est-ce encore un abus de langage destiné à se donner de l’importance en faisant peur au quidam ?

Malheureusement, à force de retourner le sujet dans tous les sens, je n’ai pu que me rendre à l’évidence: nos conceptions traditionnelles et juridiques de jus in bellum et jus ad bello semblent dépassées par les réalités stratégiques. Là où le droit de la guerre et le droit de faire la guerre sont clairement différenciés, le concept de guerre cognitive rebat les cartes en nous imposant une autre approche des conflits.

Le retour à la source de la guerre telle que définie par Clausewitz m’a permis de faire sauter ce point de blocage tenace.

Clausewitz apporte une réponse

La relecture de Clausewitz m’a alors servi de clé. Même s’il axe son propos sur la violence intrinsèque de la guerre, il rappelle que l’objectif de la guerre est d’abord d’imposer sa volonté à l’autre.
Peu importe le moyen: ce qui compte c’est d’imposer sa volonté.

La guerre est un acte de violence destiné à contraindre l’adversaire à exécuter notre volonté.
Carl von Clausewitz

Tout réside donc dans l’exécution d’une volonté. En adoptant cette perspective, nous pouvons alors aborder la conjugaison des effets dans les champs cognitifs sans rentrer dans la définition de l’affrontement armé: par exemple, une guerre commerciale pleine de rebondissements combinée avec l’emploi massif et coordonné des réseaux sociaux et des interventions incessantes dans le champ politique, le tout assorti de démonstrations militaires plus destinées aux populations qu’à l’armée adverse, tout cela converge vers le même but: faire plier le pays et sa population et l’amener à nos vues.

Cette volonté de soumission est antinomique de la négociation et du dialogue entre amis. Nous devons donc nous rendre à l’évidence: la guerre a définitivement pris une autre forme, sans pour autant exclure l’affrontement armé, bien que destructeur et risqué pour un gain souvent aléatoire.

La guerre est un état de fait, pas une situation juridique

Ainsi, nous pouvons atteindre une conclusion plutôt évidente: la guerre est un état de fait et non pas un état de droit.

La guerre peut être décidée unilatéralement par notre adversaire, sans qu’il ne soit nécessaire de mobiliser une armée, ni de la voter au parlement.

La guerre n’est alors plus un acte violent conduit qui impose l’accord du parlement et de mobiliser une armée. Il suffit désormais de faire converger de multiples actions qui prises isolément suscitent des interrogations auprès des populations ciblées, mais qui, associées, prennent alors l’aspect d’une véritable guerre, sans morts ni destructions autres que dans le champ cognitif.

Quelle conclusion ?

Du moment où nous acceptons que l’autre, en face, a choisi les termes de l’affrontement et en a ainsi saisi l’initiative, nous devons alors admettre la réalité: celui que l’on pensait être un ami ou un allié est devenu un adversaire d’autant plus impitoyable que la violence guerrière et son cortège de destructions que nous associons instinctivement à la guerre ont été effacés par la volonté non pas de nous convaincre, mais bien de nous dominer par un acte unilatéral.

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Auteur : Fabrice Jaouën

Blog personnel portant sur les sujets d'intelligence artificielle et de société.

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